Transparency International, une organisation non gouvernementale qui lutte contre la corruption à l’échelle mondiale, s’est exprimée sur l’affaire impliquant Glencore le géant minier, accusé des actes de corruption lors de l’acquisition des projets miniers en République Démocratique du Congo (RDC).
Dans une interview accordée à Mines.cd mardi, l’ONG s’est alignée dans l’objectif poursuivi par les ONG congolaises, en jugeant compréhensive cette action de la coalition « Congo N’est Pas à Vendre » en réclamation de la restitution de 150 millions USD payés par Glencore auprès des autorités suisses. Pour elle, la population concernée a un intérêt légitime à ce que les fonds obtenus illégalement retournent dans son pays et qu’elle en soit bénéficiaire.
Répondant à la question concernant le payement qui s’est effectué en Suisse alors que les actes ont été posés en RDC, Transparency International a relevé le fait que « la créance compensatrice soit payée en Suisse alors que les actes de corruption ont été commis en RDC découle de la compétence des autorités suisses en matière de poursuites pénales contre les entreprises établies en Suisse. Le paiement de la créance compensatrice aux autorités suisses est conforme aux exigences légales », a-t-elle précisé. Toutefois, il souligne le fait que « dans le cas de condamnations d’entreprises suisses pour corruption, les amendes et les créances compensatrices ont toujours été versées dans la caisse de l’Etat de la Suisse et non pas aux victimes ».
D’après l’ONG Internationale, « les instruments en place ne sont pas utiles pour effectivement faire bénéficier les victimes de la corruption internationale, c’est-à-dire les populations des pays où ont été commis les actes de corruption ». Elle explique que c’est la « Loi fédérale sur le partage des valeurs patrimoniales confisquées qui détermine la répartition des valeurs des biens confisqués dans le cadre d’une procédure pénale en Suisse ».
Transparency international a soulevé que « la RDC n’a pas collaboré et/ou participé lors de la procédure pénale contre Glencore en tant que partie plaignante comme l’exige la Loi fédérale Suisse pour soutenir par le biais de l’entraide judiciaire la procédure pénale ayant abouti à la confiscation ». De plus, même si les actes de corruption ont été commis en RDC, lésant ainsi les communautés locales, le cadre législatif suisse ne permet pas aux victimes de bénéficier de la créance compensatrice ».
Appel à la révision de la Loi suisse
Pour Transparency International, beaucoup d’autres organisations parlementaires et partis politiques suisses, il est évident que cette Loi soit révisée ou qu’un nouvel instrument doit être créé pour permettre de verser les créances compensatrices directement aux victimes de la corruption.
« Il est nécessaire de garantir que les avoirs confisqués résultant d’actes de corruption soient restitués à l’État d’origine lésé, tout en veillant à ce que le rapatriement des avoirs se fasse de manière transparente et conformément aux principes de l’État de droit, et que ces avoirs soient utilisés pour améliorer les conditions de vie de la population ou pour renforcer l’État de droit. La Suisse pourrait soutenir à cet effet des programmes qui encouragent la transparence et renforcent la lutte contre la corruption dans le pays d’origine », estime-t-elle.
La Suisse appelée à lutter contre la corruption
Toujours selon Transparency International, l’hémorragie liée à la corruption émanant des multinationales devrait être attaquée par des États comme la Suisse, par la mise en place d’instruments juridiques efficaces pour lutter contre la corruption. Mais aussi, l’« amélioration de la procédure de poursuite pénale des entreprises pour des délits de corruption et l’entraide judiciaire internationale dans les affaires de corruption internationale, ainsi que de créer des incitations pour que les multinationales coopèrent avec les autorités judiciaires en Suisse ou ailleurs ».
Par ailleurs, Transparency international a fustigé le fait que d’après une étude, « il est démontré que près d’un tiers des entreprises exportatrices suisses versent des pots-de-vin à l’étranger, mais trop peu d’entre elles sont condamnées pour corruption en Suisse ». Toutefois, elle se réjouit de la condamnation de Glencore par le Ministère public de la Confédération. Pour l’ONG, il s’agit d’un pas dans la bonne direction dans la lutte contre la corruption afin que les fonds confisqués profitent en fin de compte à ceux qui ont été lésés par la corruption, en l’occurrence la population de la RDC.
Daniel Bawuna