Le Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL) tire la sonnette d’alarme sur l’opacité et l’incohérence des chiffres dans le secteur extractif congolais. Dans un rapport d’étude publié en avril 2025, cette structure dénonce un écart vertigineux entre la valeur réelle des matières premières extraites et les revenus effectivement captés par le Trésor public entre 2020 et 2022.
71,3 milliards de dollars générés, seulement 12,5 milliards captés
Selon les données compilées à partir des rapports de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) et des lois de finances publiques, le CREFDL estime à 71,3 milliards USD la valeur réelle des ressources minières produites durant cette période. Pourtant, les recettes budgétaires effectivement perçues par le gouvernement congolais ne s’élèvent qu’à 12,5 milliards USD — soit à peine 17,5 % des richesses générées.
« Il se dégage un écart abyssal de 58,7 milliards de dollars américains, qui soulève de sérieuses questions sur la transparence et la crédibilité des recettes issues de ce secteur clé », lit-on dans le rapport intitulé: «En RDC, les revenus du secteur extractif à l’épreuve de la crédibilité et de la sincérité.»
Un paradoxe dans un secteur vital
Le secteur extractif représente environ 65 % des recettes de l’État congolais, mais reste miné par des dysfonctionnements. Le rapport pointe une absence de sincérité entre les prévisions budgétaires et les réalisations, alors que la production des métaux aurait presque doublé durant cette période, atteignant jusqu’à 34 milliards USD par an.
L’étude soulève également des interrogations autour de la gestion de 194 millions USD affectés au Fonds Minier pour les Générations Futures (FOMIN), évoquant un climat d’opacité persistant.
Des recommandations pour inverser la tendance
Face à ce constat inquiétant, le CREFDL recommande une série de mesures pour améliorer la captation des recettes issues des industries extractives :
- L’implémentation effective des plateformes LOGIRAD10 et IsysRégies11, destinées à tracer les flux financiers et automatiser les encaissements ;
- La responsabilisation des gestionnaires publics par une comptabilité transparente et des sanctions en cas de détournements ;
- La mise en place d’un système informatisé et interconnecté, réduisant les contacts humains, souvent source de fraude ;
- Une coopération renforcée entre les institutions étatiques, par le partage d’informations et la coordination des actions dans le suivi des recettes.
Un appel à l’action pour une gestion rigoureuse
Le rapport du CREFDL met en lumière les failles structurelles dans la gouvernance du secteur extractif congolais. Pour cette organisation, seule une réforme profonde et une volonté politique affirmée permettront à la RDC de tirer pleinement profit de ses ressources naturelles.
« Tant que la sincérité budgétaire et la redevabilité publique feront défaut, le pays continuera de perdre des milliards qui pourraient transformer durablement son économie », conclut le rapport.
Daniel Bawuna