La lettre du ministre national congolais des Mines du 21 mars 2025, adressée au secrétaire exécutif de la CIRGL et portant demande d’une enquête et de mesures conservatoires destinées à prévenir l’exportation des lots de minerais récemment pillés en RDC, est assez explicite. Elle reprend les noms des entreprises minières basées à Goma, victimes d’un pillage systématique relevant d’un vandalisme abject de la part des RDF et leurs supplétifs du M23. SOGECOM se retrouve la seule rescapée de cette razzia aussi bien à Goma qu’à Bukavu. Par quel miracle cette société se retrouve la seule à avoir échappé aux griffes des forces occupantes sans foi ni loi sur quasiment la quarantaine d’entités de traitement opérant dans les Nord et Sud-Kivu et exportant toutes à partir des chefs-lieux de ces deux provinces ? Le ministre Kizito Pakabomba avait-il perdu de vue SOGECOM lors de la rédaction de sa lettre et pourquoi celle-ci ne s’en est-elle pas plainte ? Quel tonnage de minerais avait-elle dans ses stocks et ces minerais s’y trouvent toujours depuis l’occupation des villes de Goma et de Bukavu ? Telles sont les préoccupations qui ne sont pas rencontrées par SOGECOM dans son droit de réponse en guise de réaction aux articles documentés qui ont fait très récemment le choux gras des médias et dont l’auteur Paul Paluku est menacé des poursuites judiciaires.
La société indienne SOGECOM n’est pas restée insensible à des articles qui ont fait très récemment le choux gras des médias, dont mines.cd et 7sur7.cd, dénonçant sa collusion avec les RDF-M23 qui occupent depuis janvier-février 2025 les villes de Goma et de Bukavu, ainsi que d’autres territoires des provinces des Nord et Sud-Kivu, et appelant aussi au retrait de son agrément pour avoir foulé aux pieds les lois et autres réglementations en la matière en RDC. A cet effet, elle a exercé, conformément à la loi qui régit les médias au Congo, son droit de réponse en guise de réaction aux articles précités.
D’emblée, SOGECOM s’étonne qu’il soit révélé qu’elle aurait miraculeusement échappé aux pillages systématiques qui ont frappé les entreprises minières à Goma et à Bukavu, ce qui insinue sa collusion avec le groupe armé M23 et les Forces de Défense Rwandaises (RDF). Elle dément ce qu’elle considère comme allégations, précisant que ses opérations sont suspendues depuis l’arrivée du M23 dans ces régions. Et d’ajouter : « Nos portes sont closes. Par quelle magie exporterions-nous des minerais dans le contexte actuel ? »
Contestant la présentation de Dharam Kotecha comme son directeur, parce que ne figurant ni dans ses statuts ni dans son organigramme officiel, ce qui est une tentative de nuire à sa réputation, SOGECOM fait savoir que depuis l’occupation de Goma et Bukavu par le M23, les banques, institutions financières et autres services miniers ont cessé leurs activités, rendant toute exploitation ou exportation impossible. Elle se demande quel opérateur économique pourrait fonctionner dans ces conditions, rappelant que les zones minières sont classées « rouges » par le Gouvernement congolais. Et de s’interroge sur l’origine des accusations répétées et sans fondement, rappelant que Paul Paluku est l’auteur de plusieurs articles à charge depuis 2022, dont « Fraude minière dans le Masisi : SOGECOM démasquée » ; lesquelles publications ont fait l’objet de plaintes judiciaires pour lesquelles le précité n’a jamais répondu aux convocations.
Pas de démenti à la lettre du ministre Kizito Pakabomba
Il est tout à fait naturel que SOGECOM veuille tirer la couverture de son côté au vu de la situation sécuritaire trouble dans les provinces des Nord et Sud-Kivu avec la prise des villes de Goma et Bukavu. Cependant, son droit de réponse ne répond pas aux préoccupations fondamentales qui restent pendantes : Par quel miracle cette société minière se retrouve la seule à avoir échappé aux griffes des forces occupantes sans foi ni loi sur quasiment la quarantaine d’entités de traitement opérant dans les Nord et Sud-Kivu et exportant toutes à partir des chefs-lieux de ces deux provinces ? Le ministre Kizito Pakabomba avait-il perdu de vue SOGECOM lors de la rédaction de sa lettre et pourquoi celle-ci ne s’en est-elle pas plainte ? Quel tonnage de minerais avait-elle dans ses stocks et ces minerais s’y trouvent toujours depuis l’occupation des villes de Goma et de Bukavu ?
En effet, dans sa lettre précitée adressée au secrétaire général de la CIRGL, dont le siège est au Burundi, afin de prévenir l’exportation illégale des lots de minerais récemment pillés en RDC, le ministre Kizito Pakabomba souligne qu’au cours de la semaine du 10 au 16 mars 2025, les exportateurs des produits stannifères installés à Goma ont été victimes d’un pillage systématique relevant d’un vandalisme abject de la part des RDF et de leurs supplétifs du M23. Au total, 174 467,1 kg de cassitérite, 7 445, 4 kg de coltan et 4748,1 kg de wolframite des entités de traitement NBB & Frères, Congo Ressources Mining SARL, CDMC SARL, Kivu Mineral Ressources et SAKIMA SA se sont volatilisés. Somme toute, cela fait 186 660,6 Kg de minerais en instance d’exportation et en attente, entreposés dans des lieux agréés et dont la RDC détient les preuves. Ces minerais, à l’en croire, ont été, au vu et au su de tout le monde, acheminés à Gisenyi, au Rwanda. Après Goma, l’opération s’est poursuivie à Bukavu où les mêmes entreprises, et bien d’autres, ont été mises à sac.
Est-ce une omission de la part du ministre que SOGECOM n’ait pas été citée ? Si c’était le cas, pourquoi ne s’en est-elle pas plainte ? Le défaut d’une plainte de sa part dénote que la société indienne a été avec égard. Et la question de savoir par quel miracle a-t-elle échappé à cette razzia reste valable. Et comment l’a-t-elle échappé seule devant cette coalition funeste sans foi ni loi ? Est-il donc déplacé de parler dans ce cas d’une collusion entre elle et les RDF-M23 ? Peut-être qu’il existe bel et bien, le français étant riche, un autre terme capable de mieux traduire cette situation que collusion. Lequel ?
La lettre du N°1 congolais des Mines spécifie, au regard des données collectées par des services attitrés auprès des entreprises pillées, le tonnage des minerais volés et emportés au Rwanda. Qu’en est-il de SOGECOM ? Quel est le tonnage des minerais en instance d’exportation et en attente dument inventorié par les services publics attitrés et l’ITSCI dans ses entrepôts avant l’occupation des villes de Goma et de Bukavu et ces minerais s’y trouvent toujours ? Il lui appartient donc d’apporter la preuve du contraire.
De toutes les façons, SOGECOM ne saurait se dérober de cette comptabilité en ce que les statistiques sont connues de tous, et particulièrement de l’ITSCI et des Divisions provinciales des Mines. Dans son avis qualifié d’« important » du 06 février 2025 relatif aux actions liées au contrôle de Goma par le groupe armé non étatique M23, l’ITSCI déclare disposer des informations sur tous les minerais étiquetés avant le 28 janvier dans les installations d’exportation de ses membres dans cette ville et avait même souhaité trouvé un moyen de les aider à gérer leur distribution tout en évitant de soutenir le M23.
Pour ce faire, elle avait émis le vœu de voir ses membres lui fournir au plus tard le 07 février un inventaire détaillé de ces stocks, des étiquètes et de carnet de bord utilisés et inutilisés au risque que tous les minerais signalés après cette date soient considérés comme associés au conflit. Et de soutenir que « le M23 étant un groupe armé non étatique, toute association entre lui et les opérations du secteur minier, l’exploitation minière, le transport, la taxation, la finance ou d’autres activités liées aux minerais ferait de ces minerais des « minerais de conflit » au regard des réglementations internationales. Il ne fait donc l’ombre d’aucun doute que les minerais pillés aussi bien à Goma (voir la lettre du ministre national congolais des Mines) qu’à Bukavu et qui ont pris la route du Rwanda, en plus de ceux non pillés de SOGECOM, sont des minerais de conflit, contaminant du fait même ceux du pays de transit, que l’ITSCI continue à étiqueter et blanchir sur le plan international. Ce qui constitue des pratiques peu appréciables à la base de la distance que l’ITA (Association Internationale d’Etain) est en train de prendre davantage vis-à-vis d’elle.
Par ailleurs, la fermeture des portes de SOGECOM et la cessation des activités des banques, des institutions financières et autres services miniers ne signifient pas l’on ne peut pas exporter ou importer absolument. Il y a une possibilité au-delà de la frontière congolaise d’où les camions de SOGECOM continuent à ramener, malgré l’occupation des villes de Goma et de Bukavu, et ce au vu et su de tout le monde, les marchandises par Gisenyi et Kamembe. Aussi, la société Halcyon y opère allégrement et c’est par elle que la société indienne vend à l’international. Membre de l’équipe de la chaîne d’approvisionnement au sein T.I.C (Tantalum-Niobium International Study Center), Dharam Kotecha y exerce comme directeur. Point n’est donc besoin de révéler que ce dernier est membre de la famille Kotecha, du nom de la société d’où résulte la filiale SOGECOM. Ceci expliquant cela, l’on ne peut ne pas croire que Dharam Kotecha, dont la société exporte les produits SOGECOM, a un œil, et le bon, sur la société familiale.
Ainsi qu’il se dégage, les articles auxquels s’en prend SOGECOM sont bien documentés et prennent en compte les lois et autres réglementations minières en vigueur en RDC dont elle devrait, sans doute, indiquer les violations. Aussi, un responsable de SOGECOM contacté autrefois au téléphone, et dont l’on se garde de publier le numéro de téléphone, s’est résolu de garder silence alors qu’il avait, d’emblée, laissé entendre que leur société continuait de fonctionner sans désemparer aussi bien à Goma qu’à Bukavu.
Paul Paluku Kambale