Une enquête de Global Witness, consultée par Mines.cd, met en lumière une vaste opération numérique visant à redorer l’image de Dan Gertler, homme d’affaires israélien engagé de longue date dans le secteur minier congolais et sous sanctions américaines depuis 2017. Publié en novembre, le rapport intitulé « Des comptes aux allures de bots sèment la désinformation en RDC en soutien de l’Israélien Dan Gertler, sous le coup de sanctions » lève le voile sur un mécanisme bien huilé mêlant comptes automatisés, relais médiatiques opportunistes et fausses allégations juridiques.
Une fausse victoire judiciaire transformée en narrative de réhabilitation
En juillet, un étrange ballet numérique a envahi X (ex-Twitter). Des dizaines de comptes au comportement robotisé — suivis par quelques sites d’actualité congolais peu transparents — ont propagé un message martelé en boucle : Dan Gertler aurait été blanchi par un tribunal arbitral israélien.
Sauf que la réalité est tout autre. Le litige cité n’a jamais porté sur les accusations de corruption qui valent au magnat israélien ses sanctions américaines, mais sur un désaccord commercial privé sans lien avec ses opérations en RDC.
Pour Global Witness, il ne fait aucun doute : cette réécriture grossière des faits s’inscrit dans une stratégie de communication coordonnée, destinée à semer le doute dans l’opinion publique et à fragiliser les organisations congolaises militant pour la transparence dans le secteur extractif.
Dan Gertler, une ombre persistante sur l’industrie minière congolaise
Membre influent de la galaxie financière active depuis plus de deux décennies en RDC, Dan Gertler a bâti une partie de sa fortune sur des partenariats et concessions minières contestées. Washington le sanctionne depuis 2017, estimant qu’il a bénéficié d’un accès privilégié à certains contrats grâce à des pratiques suspectes.
Rien de cela n’a été effacé par la procédure arbitrale évoquée dans la campagne de désinformation — une nuance que les comptes automatisés n’ont pas jugé utile de préciser.
Un scénario qui rappelle les précédents de 2020
Cette offensive numérique n’est pas une première. Global Witness rappelle qu’en 2020 déjà, un réseau comparable s’était activé pour brouiller les pistes autour des sanctions visant l’homme d’affaires. La répétition de ces méthodes illustre, selon l’ONG, une menace durable pesant sur l’espace public congolais, où manipulations en ligne et intimidations numériques deviennent des armes pour façonner l’opinion.
Mike Davis, directeur général de Global Witness, dénonce « l’utilisation de bots et de médias opaques pour propager des mensonges », rappelant qu’aucune jugeote numérique ne peut annuler des décisions de justice internationales. Il appelle également les plateformes sociales à « faire respecter plus fermement leurs règles contre les comportements inauthentiques ».
Un appel à protéger journalistes et acteurs civiques
Au-delà du cas Gertler, le rapport insiste sur les risques posés par ces manœuvres : fragilisation du travail des journalistes, isolement des militants de la transparence, baisse de la vigilance citoyenne face aux enjeux de gouvernance minière.
Ce signal d’alarme lancé par Global Witness réaffirme l’importance de défendre un espace médiatique sécurisé, où les débats sur les ressources naturelles — secteur stratégique de la RDC — ne puissent être étouffés par des campagnes d’influence pilotées dans l’ombre.
Daniel Bawuna




