Face au chômage, l’artisanat minier illégal règne en maître au quartier Kalukulu 2, dans la commune de Ruashi, à 7 km du centre ville de Lubumbashi. Dans un entretien à MINES.CD, le comité local de développement plaide pour la création d’une zone d’exploitation minière artisanale en faveur des creuseurs qui opèrent illégalement sur les concessions de Ruashi Mining et Chemaf.
Dans une ruelle étroite, en diagonale des murs de Ruashi Mining, une compagnie détenue à 75% par la société sud-africaine Metorex, se tient un homme de la trentaine révolue. En culotte, T-shirt noir et orné des bijoux en diadème, il vient de sauter les barrières séparant le quartier Kalukulu 2 des carrés miniers de l’entreprise susmentionnée. « Là, vous me voyez en tenue de travail. Je viens de sortir de là [Ruashi Mining, ndlr] », rassure-t-il d’un ton léger. « J’y ai travaillé toute la nuit pour chercher de quoi nourrir ma famille », confie-t-il, montrant du doigt une maisonnette de bières où il nous invite. Quelques minutes, plus tard, d’autres creuseurs rejoindront cette buvette.
Creuseurs clandestins
Reagan Mobali ya Mbongo (un pseudonyme), est un creuseur artisanal non en règle. Marié à deux femmes et père de deux enfants, il risque sa vie tous les jours en cherchant des minerais de cuivre et de cobalt sur les carrés miniers de Ruashi Mining, une jointe-venture détenue à 25% par l’État congolais à travers la Gecamines. « Nous manquons de travail et moi, je suis un creuseur. Un creuseur ne peut rester sans rien faire alors qu’il y a ce gisement à côté, c’est pourquoi nous venons ici, malgré la sécurité », explique-t-il d’un ton ferme, tout en ajoutant :« c’est un travail sous tension. À la moindre erreur, on vous arrête par la sécurité du site et il faut débourser entre 250.000 et 300.000 FC pour se faire libérer au niveau du parquet ».
Entre risquer de se faire arrêter et de se faire tirer dessus, il se met en danger chaque fois : il saute la barrière de l’entreprise pour y extraire des minerais, une petite quantité pour se payer juste à manger. « Ici, on nous permet de ne prendre qu’un petit sac comme ça. On ne peut pas prendre plus. Bref, on ne peut travailler normalement comme tout creuseur le ferait », révèle-t-il.
Face à cette précarité sociale, Reagan Mobali ya Mbongo fait partie de ces dizaines de jeunes qui circulent sur les concessions minières de Ruashi Mining et Chemaf afin de prendre des minerais. « Cette activité est illégale », rassure le Président du comité local de développement dans un entretien à Mines.cd.
Le comité local de développement appelle à la création d’une ZEA
Moïse Kabamba, Président de ce comité, explique que cette illégalité est le fruit d’un arrangement entre les exploitants miniers artisanaux et les services de sécurité commis à la garde de ces concessions minières. « C’est une situation qui ne s’arrange pas depuis des années », raconte-t-il. « Ils travaillent dans des mauvaises conditions. Chaque jour, il y a toujours des incidents. On tire là-bas », a-t-il ajouté. « Notre souci est qu’on nous donne une partie où nous allons exploiter en toute sécurité », plaide Oncle, un autre exploitant illégal. « Il faut dire que nous sommes là parce qu’on est au chômage. Si l’État et l’entreprise trouvent un moyen de nous créer un site artisanal légal, cela nous aidera beaucoup », a-t-il indiqué.
Cette idée est soutenue par Moïse Kabamba, qui appelle à la création d’une zone d’exploitation minière artisanale en faveur des creuseurs illégaux. Cette Z.E.A permettra également de mettre fin aux désordres récurents dans ces espaces. « Personnellement, je trouve que cela sera une bonne chose pour l’entreprise et pour la population qui pourra travailler en toute légalité. Il faut donner à ces jeunes gens un endroit où ils peuvent travailler en toute honnêteté ».
Tous nos efforts pour entrer en contact avec l’entreprise minière n’ont pas abouti.
Saïbe Kabila