Depuis trois (3) ans maintenant, plus de 25.000 ménages issus de 35 villages situés dans le territoire de Watsha, dans la province de Haut-Uélé, dorment à la belle étoile. Ces citoyens congolais étaient déguerpis par le géant minier Kibali-Gold sans indemnisation.
Des centaines de maisons ont été démolies, notamment au village Mege. Kibali-Gold se serait vue attribuer un permis d’exploitation dans ce village. Le Coordonnateur national de l’Association Nationale des victimes du Congo (ANVC) regrette le choix de la violence fait par la société.
« La société Kibali avait obtenu son permis d’exploitation au niveau du gouvernement. Au lieu qu’elle signe un protocole d’accord avec la communauté, elle s’est livrée à la violence. La loi est claire: la société doit signer un cahier de charge avec les communautés et non avec l’exécutif provincial », a fustigé Sadiki Shemukobya qui regrette de voir comment Kibali Gold se comporte en maître de tout dans la zone.
Ceux qui tentent de s’opposer à ces « forfaitures », sont parfois menacés et arrêtés en complicité avec le gouvernement provincial, révèle une autre source dans la zone, pour qui « il y a des gens qui sont enlevés ou arrêtés et ils sont gardés dans le cachot de la société minière qui commandite tout ».
Trace des minerais et chasse à la sorcière
Une autre source fait savoir que « lorsque la société trouve des traces de minerai dans un village, elle déguerpit tout le village en démolissant des maisons pour leur délocalisation. Pour le moment, il y a plus de 25 000 ménages jetés dans la rue. À d’autres endroits, ils font semblant de délocaliser les habitants en donnant un petit rien. Ce déguerpissement se fait de manière sauvage ».
L’une des victimes qui a requis l’anonymat a appelé les autorités à remettre de l’ordre dans cette zone. « Nous sommes abasourdis de ce qui se passe à Mege. Depuis notre délocalisation, nous souffrons avec nos enfants. Il y a pas des hôpitaux ici, il y a rien. Nos maris sont arrêtés, torturés et pendant ce temps, nous passons nuit à la belle étoile avec toutes les conséquences liées aux intempéries ».
Le Chef du village de Mege qui avait résisté à ces manœuvres est détenu dans un cachot inconnu, a poursuivi Sadiki Shemukobya.
La politisation du dossier
Il y a deux semaines, les victimes de Mege et Bandayi appuyées par les acteurs de la société civile avaient dénoncé la politisation de ce dossier par le cocus des députés provinciaux et d’autres élus nationaux. Ces derniers sont accusés d’entêter les victimes de s’opposer à la proposition du gouvernement provincial dans le but d’atteindre quelque chose auprès de la société Kibali Gold Mines. Ils sont accusés d’avoir remis le compteur à zéro alors que les négociations se poursuivaient dans cette zone.
Des organisations sont appelées à apporter une assistance juridique à ces vulnérables pour les remettre dans leurs droits. « Dans ce dossier de Mege, le bourreau de la population c’est l’autorité provinciale qui promet à Kibali de lui rendre la terre par la force, en dépouillant la population. Bien que cette stratégie avait échoué sous CBN, son successeur pensait parachever l’ouvrage à quelques semaines ; c’est ce qui a expliqué des décentes musclées, des cas de tortures, des intimidations, des arrestations arbitraires, violations flagrantes des droits de l’homme …par les forces de l’ordre, le mois passé », a déclaré Sadiki Shemukobya.
Pendant des manifestations de protestation, au-moins 3 personnes ont trouvé la mort, tuées par des éléments des FARDC déployés dans la zone, apprend-t-on auprès de l’autorité provinciale.
Le géant Minier ne reconnaît pas l’existence de ces villages et pense agir dans ses droits légitimes. Nous avons eu au téléphone Cyrille Mutombo, le Directeur Général de Kibali Gold: « Sur la carte géographique de la RDC, connaissez-vous, un village appelé Mege ? Nous n’allons pas réagir à ces accusations. Comme vous êtes dans l’investigation, faites votre travail, mais n’attendez rien de moi pour réagir à ces accusations ».
Outre Mege et Bandayi, des villages comme Matiko Kalinva, Matiko, Bandai, Were, Ngili, Libala Bolingo, Moku, Nganya, Kananga, Mafu, Avokala, Mazo, Galati, Renzi, Muke, Zambula,6mettre, Kola, Gimbya, Giro, et d’autres villages environnants sont ces entités dont leurs habitants étaient déguerpis.
Azarias Mokonzi