Face aux dérives persistantes dans le secteur de l’exploitation artisanale, le Chef de l’État congolais a tiré la sonnette d’alarme et annoncé une série de mesures correctives lors du 47ᵉ Conseil des ministres, tenu à Kolwezi, épicentre de l’activité minière en République démocratique du Congo.
Un constat alarmant sur le terrain
En visite à Kolwezi, dans la province du Lualaba, le Président Tshisekedi s’est dit vivement préoccupé par les conditions de travail des creuseurs artisanaux, ainsi que par les tensions croissantes avec les entreprises minières industrielles.
« Ces compatriotes, dont les efforts visent à subvenir aux besoins fondamentaux de leurs familles, se trouvent souvent privés de zones d’exploitation artisanale viables au sens de la Loi », a-t-il constaté d’après le compte-rendu lu par le porte-parole du gouvernement, Patrick Mutaya.
Privés de sites dédiés, de nombreux creuseurs opèrent illégalement dans les concessions des sociétés minières, ce qui alimente des conflits récurrents. À cela s’ajoute l’intervention d’acteurs économiques peu scrupuleux.
« Des opérateurs économiques profitent de cet état de fait pour abuser de ces intrusions dans les périmètres dédiés à l’exploitation industrielle […] sous le label d’exploitation artisanale frauduleuse, ce qui est inadmissible », a dénoncé le Chef de l’État.
Un encadrement défaillant à refonder
Le Président de la République a pointé du doigt le manque d’efficacité des coopératives artisanales, souvent démunies de moyens et de capacité d’encadrement.
« L’absence ou l’inefficacité des coopératives d’encadrement […] les place à la merci de sociétés violant le Code minier dans ses dispositions pertinentes », a-t-il souligné.
Il a également mis en garde contre les risques de récupération politique :
« La précarité des conditions sociales des creuseurs constitue une menace non négligeable du climat social, favorisant leur manipulation par des politiciens sans scrupules. »
L’EGC et l’ARECOMS en première ligne
Le Chef de l’État a rappelé que l’Entreprise Générale du Cobalt (EGC) détient le monopole de la commercialisation du cobalt issu de l’exploitation artisanale, tandis que l’ARECOMS est chargée de la régulation du secteur. Il a souligné la nécessité de renforcer leurs moyens d’action.
« Il y a une nécessité impérieuse de doter nos instruments décisionnels comme l’ARECOMS et l’EGC de moyens permettant l’éradication des abus dans le secteur minier artisanal », a insisté le Président.
Six mesures d’urgence prescrites
Pour une réforme structurelle du secteur, le Président a instruit un plan d’action coordonné impliquant les ministères concernés et les entreprises publiques. Les mesures incluent :
- L’identification rapide de zones légales d’exploitation artisanale ;
- Des négociations avec les entreprises minières, dont la Gécamines, pour libérer certaines zones à l’artisanat minier ;
- L’application stricte des normes encadrant les entités de traitement ;
- Le renforcement des capacités opérationnelles de l’ARECOMS ;
- Un partenariat stratégique entre l’EGC et la Gécamines ;
- Un appui sécuritaire de la gouverneure du Lualaba, en coordination avec le ministère de l’Intérieur et les FARDC.
« Il s’avère nécessaire d’envisager la délimitation de périmètres spécifiques réservés exclusivement à l’exploitation artisanale, ainsi qu’un cadre organisationnel permettant à ces exploitants de travailler dignement », a plaidé Félix Tshisekedi.
Un rapport attendu dans un mois
Pour assurer le suivi, le Président a exigé la soumission d’un rapport circonstancié dans un délai de 30 jours par les différentes parties impliquées.
« Un rapport est attendu au Conseil des ministres dans un délai de trente (30) jours, afin de permettre le suivi de la mise en œuvre de toutes ces mesures », a conclu le Chef de l’État.
Junior Ngandu