Alors qu’un nouvel accord de principes entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, sous la médiation des États-Unis, est en gestation, Jean-Pierre Okenda, Directeur exécutif de l’ONG La Sentinelle des Ressources Naturelles et analyste principal en gouvernance des industries extractives, s’est confié à MINES.CD. Selon lui, cet accord en discussion est « dynamique et global », et pourrait ouvrir la voie à un compromis mutuel.
« Il y a des concessions qui seront faites de part et d’autre, y compris de notre pays. Et ça, c’est extrêmement important », a-t-il souligné.
Un précédent peu connu mais existant
Revenant sur les précédents engagements entre Kinshasa et Kigali, l’expert rappelle l’existence d’un accord signé sous le leadership du président Félix Tshisekedi, visant à favoriser une coopération économique intégrée autour des chaînes de valeur des minerais stratégiques congolais.
« Il existe déjà un accord dont on parle peu. Il prévoit que les minerais de la RDC soient transformés au Rwanda. Cet accord a été signé à l’initiative conjointe de nos deux gouvernements, indépendamment des blocs régionaux comme la SADC ou l’EAC », a précisé Jean-Pierre Okenda.
Il estime d’ailleurs que ce nouvel accord en préparation ne se distingue pas fondamentalement de celui signé avant la résurgence des tensions dans l’Est du pays.
La transformation locale des minerais, une priorité selon Okenda
Pour cet expert du secteur extractif, la transformation locale des ressources naturelles devrait rester une priorité, même si elle se fait dans un pays voisin comme le Rwanda.
« Aujourd’hui, les minerais quittent l’Est ou le Sud-Est du Congo pour être raffinés en Malaisie, et l’Afrique n’y gagne rien. Si les conditions sont réunies au Rwanda, je préférerais que la valeur ajoutée soit réalisée en Afrique. Nous devons trouver une approche gagnant-gagnant », a-t-il plaidé.
Jean-Pierre Okenda reconnaît toutefois que cette vision pourrait susciter l’incompréhension de la population congolaise, en raison du contexte de tensions persistantes. Il appelle donc les élites, y compris les leaders politiques, à initier un dialogue honnête avec les citoyens.
Au-delà des régimes, penser Afrique
Malgré les conflits et méfiances entre la RDC et le Rwanda, Jean-Pierre Okenda estime qu’il est temps de dépasser les clivages politiques pour construire une chaîne de valeur africaine intégrée.
« Il faut surmonter les divisions internes. Il y a un peuple d’Afrique. Pour une chaîne de valeur intégrée des minerais sur le continent, je suis totalement favorable », a-t-il insisté.
« Il est essentiel de trouver un équilibre pour que la transformation des minerais au Rwanda soit aussi bénéfique à la RDC », a-t-il recommandé.
Pour rappel, l’accord de principes en discussion, impulsé par le Secrétaire d’État américain Marco Rubio, vise à établir une coopération économique renforcée entre la RDC et le Rwanda. Il porte notamment sur le secteur minier, avec l’objectif de répondre aux défis sécuritaires, de favoriser l’intégration économique régionale, d’encourager les investissements américains et de promouvoir plus de transparence dans l’exploitation des ressources naturelles.
Daniel Bawuna