La guerre menée par le Rwanda avec ses supplétifs du M23 contre la République démocratique du Congo est largement motivée par le pillage des ressources naturelles de l’Est du pays, selon plusieurs rapports d’experts de l’ONU et d’organisations internationales. Toutefois, certains analystes estiment que même si la RDC parvenait à une victoire militaire des FARDC, l’exploitation illégale de ses minerais ne prendrait pas fin pour autant.
Dans une analyse partagée avec la presse ce lundi 3 mars 2025, le professeur Dady Saleh, ancien expert minier en RDC, a appelé le gouvernement à rendre le secteur minier plus attractif afin de limiter la contrebande et les conflits armés qui en découlent.
Faire de la RDC un acteur incontournable du marché minier
D’après le professeur Dady Saleh, une politique minière plus dynamique et encadrée pourrait réduire les convoitises extérieures et permettre au pays d’accélérer son développement économique et social.
« Chaque pays a une chance de se développer, et le Congo, avec ses immenses richesses minérales, doit impérativement contrôler ses ressources. Il est inacceptable que plus de 80 % des Congolais vivent dans la pauvreté alors que nous avons un sous-sol aussi riche. Avec une bonne gouvernance, la RDC peut nouer des partenariats stratégiques qui profiteront directement à son peuple », a-t-il soutenu.
Selon lui, la clé du changement réside dans la gestion rigoureuse des minerais et dans la signature d’accords équitables avec des partenaires internationaux fiables.
Exercer une pression sur la communauté internationale
Le professeur Dady Saleh plaide également pour une action diplomatique plus offensive afin d’empêcher le Rwanda de vendre des minerais extraits illégalement en RDC.
« Kigali n’a pas le droit d’exporter des ressources volées sur le territoire congolais. De nombreux rapports en attestent. La RDC doit s’appuyer sur des alliés comme les États-Unis, la Russie et la Chine pour mettre un terme à cette fraude », a-t-il conseillé.
Il rappelle que cette exploitation illégale des ressources congolaises est l’une des principales causes du conflit qui ravage le pays depuis plus de 30 ans, avec un bilan de plus de 10 millions de morts.
Reprendre le contrôle des ressources stratégiques
Dady Saleh met en avant le rôle stratégique que joue la RDC dans le marché mondial des minerais.
« Le cobalt et le coltan congolais représentent respectivement 15 % de la production mondiale et entre 60 et 80 % des réserves mondiales. Pourtant, ce sont Kigali et d’autres acteurs étrangers qui en tirent profit, tandis que le peuple congolais reste dans la misère », a-t-il fustigé.
Il pointe du doigt l’Union européenne, qu’il accuse d’être complice de l’exploitation illégale des ressources congolaises en entretenant des contrats opaques avec le Rwanda.
Un repositionnement stratégique sur l’échiquier international
Face à ces enjeux, la RDC doit impérativement revoir ses alliances, a insisté le professeur Dady Saleh.
« Le pays doit bien choisir ses partenaires et envisager de se tourner vers la Russie comme allié stratégique. La lutte contre le pillage des ressources naturelles est une question de souveraineté et de survie pour la RDC. »
Tout en saluant certaines avancées diplomatiques, notamment les pressions exercées par le Conseil de sécurité de l’ONU sur le Rwanda, l’expert a exhorté le gouvernement à se défendre avec fermeté et à affirmer ses droits.
En somme, l’expert a argué que le pillage des ressources minières congolaises ne s’arrêtera pas avec la simple défaite militaire de l’agression RDF/M23. Pour protéger son sous-sol et en tirer profit, la RDC doit renforcer la gouvernance de son secteur minier, exercer une pression diplomatique accrue et sécuriser ses partenariats internationaux. Sans ces mesures, le pays risque de rester piégé dans un cycle de guerres et de prédations économiques qui entravent son développement.
Azarias Mokonzi