Le Code minier de 2018 prévoit une redistribution équitable des revenus miniers aux communautés. Mais un système mal appliqué, miné par l’inertie et les fraudes, réduit cette ambition à une illusion.
En effet, sur le papier, la République démocratique du Congo dispose d’un des cadres juridiques les plus avancés d’Afrique en matière de redistribution minière. Le Code minier et son règlement d’application imposent aux entreprises de reverser 0,3 % minimum de leur chiffre d’affaires à des projets communautaires. Mais à l’épreuve des faits, cette noble intention s’effondre sous le poids des fraudes, des défaillances institutionnelles et de l’inaction étatique.
Une base juridique robuste… inopérante
L’arsenal législatif est pourtant clair. Les articles 258 bis et 285 octies du Code minier, ainsi que l’article 414 sexies du Règlement minier, définissent un mécanisme rigoureux : dotation annuelle, gestion transparente, obligation de reddition de comptes, appels d’offres, normes comptables OHADA.
Mais la réalité décrite dans le rapport de la Cour des comptes est tout autre : absence de contrôle, détournements, failles de coordination.
Un non-respect généralisé des règles
Entre 2018 et 2023, les entreprises ont déclaré à la direction générale des impôts (DGI), un chiffre d’affaires cumulé de 98,2 milliards USD, mais seulement 81,4 milliards USD aux DOTS. Résultat : 97 millions USD de manque à gagner, soit autant de forages, écoles et routes envolés.
Les DOTS, censés gérer ces fonds, passent des marchés sans appel d’offres, accordent des paiements anticipés illégaux, et ne tiennent pas de comptabilité conforme.
Le maillon faible : les institutions de contrôle
Le Comité de Supervision, clé de voûte du système, n’a mis en place aucun mécanisme de vérification. Faute de collaboration avec la DGI, il ignore les vrais chiffres d’affaires des entreprises. Pire, seuls 46 DOTS ont été créés, laissant de nombreuses communautés sans structure de gestion.
L’État se retrouve ainsi dans une impasse institutionnelle, incapable d’assurer l’effectivité de sa propre législation.
Des solutions, mais un doute sur leur mise en œuvre
La Cour des comptes propose des pistes concrètes :
- Mise en place d’un système de vérification croisée DGI-DOTS,
- Renforcement des capacités des DOTS,
- Destitution des gestionnaires défaillants,
- Application des sanctions prévues par la loi.
Mais en l’absence de volonté politique ferme, ces recommandations resteront théoriques.
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Les DOTS pour gestion de 0,3% : Des structures fantômes, des millions sans trace https://mines.cd/les-dots-pour-gestion-de-03-des-structures-fantomes-des-millions-sans-trace/
Le Code minier de 2018 aurait pu faire du Haut-Katanga et du Lualaba des modèles de développement inclusif. Mais son exécution défaillante en fait aujourd’hui un simple affichage juridique, sans impact réel pour les communautés.
En somme, tant que les entreprises minières pourront frauder sans crainte et que les institutions de contrôle resteront amorphes, la loi ne sera qu’un mirage juridique.
Prochainement :
Modèle communautaire minier : chronique d’un échec programmé
La Rédaction | mines.cd