Dans le cadre de son programme gouvernance justice climatique et environnementale, le Centre Carter a organisé ce jeudi 3 octobre 2024, la première session du dialogue citoyen pour la maximisation des recettes minières en RDC. C’est la ville de Kolwezi, chef-lieu de la province du Lualaba qui a accueilli cette activité.
Bénéficiant de l’appui financier de l’Union Européenne et de la Coopération Allemande mise en œuvre par la GIZ, ce projet entend contribuer à la mobilisation maximale des recettes minières. Cela se fera à travers un dialogue constructif entre les acteurs de la société civile et le gouvernement congolais, centré sur les défis et les problèmes qui limitent la collecte du maximum des fonds issus du secteur minier en RDC, particulièrement dans la filière cuivre-cobalt.
De prime abord, la présentation du projet « dialogue citoyen pour maximisation des recettes minières, a été faite par Maître Fabien Mayani, Directeur de Programme Droits Humains et Transition Juste du Centre Carter.
L’objectif poursuivi par le dialogue citoyen, c’est de promouvoir la transparence et la responsabilité afin que l’exploitation des ressources extractives participe au développement durable des populations congolaises.
Les enjeux des ressources minières en RDC
Dans son argumentaire, le Directeur de Programme Droits Humains et Transition Juste du Centre Carter a présenté la RDC comme un pays riche en ressources minières, en particulier le cuivre et le cobalt, des minerais indispensables pour la transition énergétique verte.
Maître Fabien Mayani a fait valoir qu’au cours des quinze dernières années, la RDC a attiré des investissements étrangers massifs, principalement dans ces secteurs stratégiques. Cependant, a-t-il fait constater, malgré ces investissements, les recettes générées par le secteur minier ne sont pas à la hauteur des attentes en raison de plusieurs facteurs structurels et opérationnels.
Parmi ces facteurs figurent un cadre juridique permissif, des pratiques d’évasion fiscale et de corruption, ainsi qu’une coordination limitée entre les agences de l’État impliquées dans la collecte des recettes publiques.
Les analyses menées par le Centre Carter entre 2013 et 2023 sur sept projets miniers ont mis en évidence des méthodes utilisées par certains opérateurs pour contourner les obligations fiscales. Les filières du cuivre, du cobalt, de l’or et de la cassitérite ont ainsi été particulièrement touchées par ces pratiques.
Réformes et limites
Face à ces défis, l’État congolais a entrepris des réformes majeures, notamment la révision du Code minier en mars 2018. Cette révision a permis d’augmenter le taux de la redevance minière et d’élargir son assiette. De nouvelles taxes, comme la taxe spéciale sur le profit excédentaire, ont également été introduites pour mieux capter les gains du secteur. Toutefois, malgré ces réformes, des analyses récentes du Centre Carter montrent que la capacité du gouvernement à maximiser les recettes reste limitée, même après l’adoption de ces nouvelles dispositions légales.
De son côté, Baby Matabishi, Coordonnateur des revenus et ITIE du Centre Carter, a fait une présentation sur les défis de mobilisation des recettes minières en RDC : regard critique du régime fiscal.
Quid du régime fiscal minier en RDC ?
Le secteur minier congolais est encadré par plusieurs textes législatifs, notamment le Code Minier et divers décrets, qui définissent un régime fiscal exclusif et exhaustif, a relevé Baby Matabishi. Ce régime est complété par d’autres lois régissant les impôts, les douanes et les recettes administratives.
Les flux de revenus dans le secteur incluent des paiements fiscaux et parafiscaux, et impliquent différents acteurs chargés de la collecte des recettes. La coordination entre ces intervenants et la transparence des informations sont cruciales pour assurer une bonne gouvernance.
Une évaluation préliminaire, faite par le Coordonnateur des revenus et ITIE du Centre Carter, a ressorti des défis significatifs, tels que l’érosion de l’assiette fiscale et la faible coordination entre les services responsables de la collecte. Le système déclaratif est souvent inefficace, entraînant des Avis de Mise en Recouvrement (AMR) qui soulignent les lacunes du régime fiscal actuel.
Les AMR, bien que nécessaires, indiquent un manque de maîtrise du système par les opérateurs miniers, soulevant des questions sur la complexité du régime fiscal et l’accompagnement offert par l’administration. Les recommandations incluent l’amélioration du régime fiscal, la simplification des processus, et la création d’un modèle fiscal intégré pour maximiser les recettes du secteur minier.
Parmi les recommandations :
- Chaque ETD doit créer sa propre régie financière locale;
- L’article 105 de la loi organique sur l’organisation et le fonctionnement des ETD dispose que « L’entité territoriale décentralisée établit les mécanismes propres de leur recouvrement;
- Mise en place d’un cadre de coordination et de partage d’informations entre les services d’assiette et les ETD.
La mise en place d’un régime fiscal clair et efficace est essentielle pour maximiser les recettes minières en RDC. En améliorant la transparence et en renforçant les capacités des acteurs impliqués, le pays pourra mieux exploiter ses ressources naturelles au bénéfice de la population congolaise.
Junior Ngandu