Avec la publication de plusieurs rapports, enquêtes et monitoring sur l’exploitation minière en République démocratique du Congo – particulièrement sur la chaîne d’approvisionnement du cobalt – le pays de Tshisekedi risque d’être interdit d’exporter ses matières premières. Des menaces de bannissement se sont surtout multipliées pour le cobalt congolais, mal réputé à l’international à cause de suspicion de tant d’irrégularités dans son exploitation.
Ces menaces ciblent autant le cobalt issu de l’artisanat – à la merci des enfants comme des groupes armés – et de la filière de production industrielle.
Premier fournisseur mondial, Kinshasa – qui fonde sa santé financière en grande partie sur l’exploitation minière – est à la défensive. Dans une mise au point parvenue à MINES.CD ce lundi, la ministre congolaise des mines tente de rassurer les miniers. Elle évoque de projets qui traduisent la « volonté de formaliser et améliorer le système de traçabilité des minerais dans la filière artisanale ».
Parmi les initiatives congolaises pour assainir son secteur minier, Antoinette N’samba cite notamment « la validation du cadre normatif sur le cobalt d’exploitation minière artisanale et à petite échelle, avec l’Initiative pour une chaîne d’approvisionnement en Minerais Responsable ( Responsible Minerals Initiative, RMI ) ; L’opérationnalisation de l’Entreprise Générale du Cobalt, qui œuvre à la valorisation du cobalt issu de la production artisanale en faveur du développement économique en RDC, tout comme celle de l’Autorité de Régulation et de Contrôle des Marchés des Substances Minérales Stratégiques, organe de régulation et d’assainissement des marchés des substances minérales stratégiques ».
Métal très rare, peu présent en Europe mais en abondance en RDC, le cobalt est stratégique dans la transition énergétique. Son exploitation est extrêmement dangereuse mais non ou presque pas encadré par l’Etat congolais. Femmes, enfants, mineurs, tous exposé à l’inhalation régulière de hautes doses de ce métal pourtant cancérogène et présente également des risques cardiovasculaires.
Le travail des enfants et l’avenir du cobalt congolais
Les préoccupations en matière de droits de l’homme associées à l’exploitation minière artisanale du cobalt en République démocratique du Congo et au travail des enfants ainsi qu’aux violations des droits de l’homme qui y sont liées ont fait en sorte que les perspectives à plus long terme du cobalt pourraient se heurter à des obstacles en raison des efforts visant à réduire son utilisation dans les batteries.
Une décision du tribunal fédéral de Washington publié en 2021, a révélé que la société mère de Google Alphabet, Apple, Dell, Microsoft et Tesla, ont opté pour un recours collectif revendiquant leur responsabilité dans le travail présumé d’enfants dans les mines de cobalt congolaises.
Aux côtés des enfants et groupes armés, les noms de plusieurs officiels congolais sont également cités dans l’exploitation du cobalt. Très récemment, c’est la mère de l’actuel Président qui était citée dans une affaire d’exploitation des minerais dans une des zones de la société ERG, dans le Lualaba.
À l’heure actuelle, les efforts en cours consentis pour substituer le cobalt dans les applications de batteries, n’empêcheront certainement pas le cobalt de rester « une matière première vitale pour l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement des batteries dans les années à venir ».
La demande de composant essentiel des chimies clés des batteries lithium-ion rechargeables utilisées dans les véhicules électriques – ayant connu un changement significatif dans son paysage de production mondial – devrait plus que doubler d’ici les sept prochaines années pour atteindre 388 000 tonnes.
Des chiffres en baisse
Alors qu’elle est jusque-là leader incontournable de la production mondiale de cobalt – avec plus de 70% de production à elle seule – la République démocratique du Congo devrait voir sa domination sur la planète diminuer à 57 % d’ici 2030.
Au même moment, l’Indonésie accroît sa production de cobalt en tant que sous-produit de son industrie du nickel en pleine expansion.
L’année dernière, l’Indonésie a produit jusqu’à 9 500 tonnes contre 2 700 tonnes, il y a deux ans, avec le potentiel de décupler la production d’ici 2030. Au total, la production mondiale de cobalt a atteint 197 791 tonnes, la République démocratique du Congo contribuant pour un peu moins de 145 000 tonnes de ce mélange.
La croissance exponentielle du secteur des véhicules électriques devrait entraîner un doublement de la demande mondiale de cobalt d’ici 2030. Ceci est la conséquence du fait que celle-ci est le plus grand consommateur de cobalt, avec une demande totale de 40 %.
« La chute des prix du cobalt, qui a chuté de près de 30 % cette année à 13,90 dollars la livre, a durement touché la RDC », a précisé Cobalt Institute.