Le rapport intitulé « Alimenter le changement ou le statu quo ? » élaboré par Amnesty International et l’Initiative pour la bonne gouvernance et les droits humains (IBGDH), a révélé l’expulsion « forcée » de populations de leurs habitations et de leurs champs suite à la course à l’expansion des opérations minières d’entreprises multinationales dans la province de Lualaba.
Selon ce document consulté par MINES.CD, l’expansion de mines industrielles de cobalt et de cuivre a largement entraîné des graves atteintes aux droits humains, dont des agressions sexuelles, incendies volontaires et violences physiques.
Les informations rapportées par Amnesty International attestent que si certaines entreprises multinationales sont des responsables et commanditaires de ces actes d’atteintes aux droits humains, les éléments des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) en sont les « exécutants ».
« Près du site de Mutoshi – géré par Chemical of Africa SA [une filiale de Chemaf Resources Ltd] dont le siège se trouve à Dubaï – des personnes interrogées ont déclaré que des militaires avaient brûlé une agglomération informelle nommée Mukumbi », a expliqué le rapport commun d’Amnesty International et IBGDH.
Selon le chef de cette agglomération, Ernest Miji, en 2015, après que Chemical of Africa SA a obtenu le bail de la concession, trois personnes se disant « représentants de l’entreprise » lui ont rendu visite avec deux policiers pour l’informer qu’il était temps pour les habitants de Mukumbi de déménager. Il a indiqué que les représentants de l’entreprise étaient venus quatre autres fois.
Les personnes interrogées ont déclaré aux enquêteurs d’Amnesty International, que des militaires de la Garde républicaine (GR), une unité militaire d’élite, étaient arrivés un matin et avaient commencé à « brûler des logements et à frapper les villageois qui essayaient de les en empêcher ».
« Nous n’avons rien pu récupérer […] On n’avait rien pour survivre. On a passé des nuits et des nuits dans la brousse », a déclaré Kanini Maska, 57 ans, l’une des victimes.
Le rapport épingle également le fait qu’une petite fille, qui avait deux ans à l’époque, a été grièvement brûlée et a des cicatrices irréversibles. Son oncle a déclaré que le matelas sur lequel elle était couchée « avait pris feu ».
« Des images satellites appuient les informations selon lesquelles Mukumbi, qui était composé d’environ 400 structures, dont une école, un établissement de santé et une église, a été détruit le 07 novembre 2016 », ajoute la source précitée.
Destructions et agressions sexuelles
Eurasian Resources Group SARL (ERG) – dont le siège se trouve au Luxembourg et dont l’actionnaire majoritaire est l’État du Kazakhstan, gère le projet Metalkol Roan Tailings Reclamation (Metalkol RTR) – dans une agglomération près du chef-lieu de la province du Lualaba, Kolwezi.
Tout semblait évoluer normalement, jusqu’à ce qu’une vingtaine d’agriculteurs faisant partie d’un collectif dont les cultures se trouvaient aux abords de la concession près du village de Tshamundenda ont haussé le ton pour révéler le fait qu’en février 2020, « sans qu’ils aient été consultés et sans aucun préavis », des militaires, dont certains avec des chiens, « avaient occupé leurs champs tandis que des bulldozers rasaient leurs cultures ».
L’une des victimes nommée Kabibi, a expliqué qu’alors qu’elle essayait de récolter ses cultures avant qu’elles soient détruites, « trois soldats l’ont saisie avant de la violer, pendant que d’autres assistaient à la scène ».
« Je suis veuve, je n’ai pas les moyens d’inscrire mes enfants à l’école … À ce jour, je n’ai pas d’emploi ni d’autres sources de revenus. Je vais de maison en maison afin de trouver de quoi manger pour mes enfants », s’est-elle alarmée.
Les agriculteurs et agricultrices ont manifesté à plusieurs reprises et ont réclamé une indemnisation, mais aucun recours utile ne leur a été proposé. En réaction, ERG a déclaré ne pas « contrôler le déploiement de militaires ».
L’entreprise a déclaré que le gouvernement estimait que le collectif d’agriculteurs et agricultrices avait été indemnisé par un ancien opérateur de la mine, ce que les agriculteurs et agricultrices nient jusqu’à ce jour.