Alors que le monde s’arrache les minerais stratégiques nécessaires à la transition énergétique, la société civile congolaise entend rappeler une vérité simple : sans justice sociale et sans transformation locale, le cobalt, le cuivre ou le lithium ne feront pas le développement de la RDC.
Lubumbashi, capitale du cuivre et miroir des paradoxes miniers congolais, accueille du 29 au 31 octobre 2025, la 9ᵉ édition de l’Alternative Mining Indaba (AMI), un rendez-vous devenu incontournable pour les acteurs du secteur extractif, les représentants de l’État et les organisations de la société civile.
Placée sous le thème « Enjeux géopolitiques mondiaux et impacts socio-économiques locaux », cette édition ambitionne de faire entendre la voix des communautés affectées par l’exploitation minière, souvent marginalisées dans un secteur pourtant vital pour l’économie congolaise.
Redéfinir la gouvernance minière
Dans son discours d’ouverture, le Dr Claude Kabemba, directeur exécutif de Southern Africa Resource Watch (SARW), a planté le décor avec des mots forts : « Nous devons refuser que la RDC soit une simple plateforme d’extraction au service des économies étrangères. »
Pour lui, la doit repenser sa gouvernance minière, afin que les populations vivant autour des sites d’exploitation cessent d’être spectatrices d’une richesse qui leur échappe.
« Les minéraux stratégiques doivent devenir un levier d’industrialisation, d’emploi, d’innovation et de transformation locale », a-t-il insisté, estimant que la souveraineté minérale passe par la transformation sur place et une redistribution équitable des revenus.
L’ONG qu’il dirige milite pour un cadre légal plus rigoureux et participatif, où les communautés locales seraient reconnues comme acteurs économiques à part entière, et non comme victimes collatérales d’un développement imposé d’en haut.
Un appel entendu par les pouvoirs publics
Présent à la cérémonie, Franck Fwamba, conseiller du ministre national des Mines, Louis Watum Kabamba, a assuré que les recommandations issues de l’AMI 2025 seront intégrées dans le programme national sur les minerais stratégiques en cours d’élaboration.
« Le ministre des mines attend des propositions concrètes pour une gestion transparente, équitable et durable de nos ressources », a-t-il déclaré, soulignant la volonté du gouvernement d’ouvrir un dialogue constructif avec toutes les parties prenantes — État, entreprises, communautés et société civile.
Pour Franck Fwamba, la vision du Chef de l’État et de la Première ministre est claire : faire du secteur minier un catalyseur de développement, et non une rente alimentant les frustrations.
Des partenaires internationaux à l’écoute
La coopération allemande (GIZ), principal partenaire technique et financier de l’événement, a salué les efforts de la RDC pour bâtir une chaîne de valeur locale.
Dans son allocution, Herminie Delanne, conseillère technique principale à la GIZ, a insisté sur la nécessité d’un « partenariat équilibré », où la transparence, l’inclusion et la durabilité guideraient les futures politiques minières.
Le ministre provincial des Mines du Haut-Katanga, Lucien Lumano Mukadi, représenté à la cérémonie, a quant à lui rappelé l’importance d’une meilleure coordination entre les niveaux national et provincial, afin de garantir que les recettes minières se traduisent en projets concrets pour les populations.
Des attentes fortes pour les résolutions finales
Les travaux, qui se poursuivent jusqu’au 31 octobre 2025, aborderont des thèmes sensibles : la valeur ajoutée locale, la transparence des accords internationaux, la gestion de l’artisanat minier et la répartition équitable des revenus.
« Il est temps que les mines cessent d’être une malédiction pour devenir une bénédiction », a lancé un participant lors de la session inaugurale, traduisant le sentiment dominant dans la salle.
Alors que les regards du monde se tournent vers la RDC pour ses ressources stratégiques au cœur de la transition énergétique, les acteurs réunis à Lubumbashi rappellent qu’une transition énergétique véritablement juste ne peut se faire sans justice sociale ni souveraineté économique.
Junior Ngandu




