Dans son rapport définitif sur la situation sécuritaire en République démocratique du Congo, datant de mi-juin 2023, le groupe d’experts des Nations unies a révélé que selon plusieurs sources contactées, la décision de créer la société Primera Gold DRC a été prise sans consultation avec la ministre congolaise des mines, Antoinette N’samba, pourtant ces questions relèvent clairement de son mandat.
« Trois sources averties ont informé le groupe d’experts que la ministre avait désapprouvé l’accord et donc refusé de cosigner le décret régissant les activités de la société », ont clairement indiqué les experts onusiens dans l’entame de leur communication. En même temps, ils ont signifié que d’autres sources averties ont confirmé que le Centre d’expertise, d’évaluation et de certification des substances minérales précieuses et semi-précieuses (CEEC) « ne voulait pas délivrer les certificats » de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) pour deux exportations de la société Primera Gold DRC en janvier 2023.
Ce véto du CEEC s’expliquait par le fait qu’il avait exprimé des doutes sur « la conformité de ces exportations avec les lois congolaises et les conditions d’exportation définies par le mécanisme régional de certification de la CIRGL », notamment la commercialisation de l’or à partir d’un site validé ; et les exigences selon lesquelles, il faudra que la chaîne d’approvisionnement ne soit pas liée au financement des groupes armés et qu’il ne puisse pas impliquer le travail d’enfants.
Selon des sources du groupe d’experts, le CEEC n’avait pas toutes les informations nécessaires lui permettant de confirmer le respect de ces conditions. Cependant, le CEEC a mis fin à cette opposition à la suite de l’intervention de la Présidence de la République démocratique du Congo.
« Des sources au sein de la Présidence et de Primera Gold DRC ont à leur tour dit au groupe d’experts que le ministère des mines craignait de perdre les gains financiers tirés de la contrebande de l’or, d’où son opposition », a expliqué le rapport des experts onusiens.
Pressions et crainte des représailles
Le groupe d’experts a, dans son rapport de plus de 200 pages, révélé avoir reçu des informations selon lesquelles des responsables du ministère des mines et des services miniers spécialisés ainsi que la ministre, Antoinette N’samba, elle-même « ont subi des pressions pour accepter finalement l’initiative de Primera Gold DRC ».
Selon les experts, ils craignaient des « représailles de la part de la Présidence de la République démocratique du Congo », qui avait fait de Primera Gold DRC la pierre angulaire de ses initiatives dans le secteur aurifère.
« Des responsables du ministère des mines et des services miniers spécialisés aux niveaux national et provincial se sont également inquiétés du fait que d’après l’accord, Primera Gold DRC avait un monopole de fait sur les exportations d’or artisanal de la République démocratique du Congo », a renchéri le rapport des Nations unies consulté par MINES.CD.
En outre, cette inquiétude était partagée par les acteurs économiques du Sud-Kivu, qui ont examiné l’arrêté ministériel du 14 mars 2023. Ils ont relevé que l’ordonnance exigeait des négociants qu’ils exportent par mois au moins 100 kilogrammes d’or de la République démocratique du Congo, ce qui, selon eux, aurait pour effet « d’exclure tous les autres acteurs du marché au profit de Primera Gold DRC ».
« Je n’ai en aucun moment désapprouvé le partenariat »
Ayant pris connaissance du rapport final du groupe d’experts des Nations Unies – au sujet état du prétendu mécontentement du secteur minier – la ministre congolaise des mines, Antoinette N’samba, a via son compte Twitter, rejetté en bloc les faits misent à sa charge dans le susdit.
« Je n’ai en aucun moment désapprouvé le partenariat ni refusé de contresigner le Décret du Premier ministre : un collègue assurant mon intérim a contresigné le décret à ma place, au motif qu’à la date de la signature, j’étais en mission dans le Kasaï-Oriental », a-t-elle assuré.
La patronne des mines congolaises a également souligné que l’exécution du partenariat entre la République démocratique du Congo et Primera Gold a permis de ramener vers les circuits officiels la production artisanale de l’or, qui transitait frauduleusement par des pays voisins, particulièrement le Rwanda, au mépris des normes internationales et régionales en matière d’approvisionnement responsable des substances minérales et sous le regard complice de tous nos partenaires bi et multilatéraux.
Monge Junior Diama