Au petit matin du samedi 15 novembre 2025, le site minier de Kalando, dans le territoire de Mutshatsha au Lualaba, s’est transformé en scène d’horreur. À Mulondo, un village pourtant habitué à la rumeur des machines et au ballet incessant des creuseurs, personne n’était préparé à compter les morts par dizaines.
Le bilan est implacable : 49 victimes, dont 47 retrouvées sur place et 2 décédées à l’hôpital, sans compter les blessés – parmi lesquels deux hommes atteints par balles.
À 10 h 53, tout bascule. Un pont artisanal, dressé à la hâte au-dessus d’une tranchée délimitant le périmètre d’exploitation, cède sous le poids d’une foule compacte d’exploitants miniers artisanaux en fuite. Car juste avant l’effondrement, des coups de feu ont retenti. Des tirs d’intimidation, affirment plusieurs témoins, provenant d’hommes armés affectés à la « sécurisation » du site semi-industriel.
Un engrenage fatal
Ce samedi n’était pas un jour comme les autres : les exploitants artisanaux n’ont accès au site que les week-ends, créant à chaque fois un afflux incontrôlable.
Sous la panique provoquée par les tirs, la structure déjà fragile n’a offert aucune résistance. En quelques secondes, des dizaines d’hommes sont précipités au fond de la tranchée, certains écrasés, d’autres asphyxiés dans l’entassement.
Kalando n’en était pourtant pas à son premier avertissement. Situé à près de 42 km au sud-est de Kolwezi, le site est depuis longtemps le théâtre d’une cohabitation explosive : exploitants artisanaux, coopératives, partenaires privés et forces armées cohabitent dans un désordre où chacun tente d’imposer son autorité.
La présence d’hommes armés, non officiellement reconnus, y est dénoncée depuis des mois. Sans résultat.
L’un des pires drames miniers artisanaux de ces dernières années
Les secours, perturbés par l’état du terrain et les mouvements de foule, ont mis des heures à stabiliser la situation. Les équipes médicales ont dressé un bilan glaçant : 47 morts sur le champ, 2 décès à l’hôpital, plusieurs blessés graves, et deux personnes atteintes par balles, preuve que la violence armée a précédé la panique mortelle.
La liste définitive des victimes n’est pas encore arrêtée. Les recherches continuent, les identifications aussi.
Un secteur artisanal livré à lui-même
À Kalando comme ailleurs au Lualaba, la tragédie révèle un malaise profond et structurel. Les failles sont connues :
absence de sécurisation des sites,
circulation incontrôlée des hommes en uniforme,
installations de fortune,
accès non régulés,
exploitation semi-industrielle opaque.
Autant de signaux ignorés, jusqu’au drame.
Les autorités locales et provinciales sont désormais sous pression. Les organisations de la société civile appellent à : une réorganisation stricte des zones artisanales, la fin de la présence d’hommes armés illégaux, un encadrement renforcé des exploitants, et la clarification des responsabilités dans la chaîne de gestion du site.
Un drame évitable, une responsabilité collective
Pour de nombreux observateurs, Kalando restera dans les annales comme l’un des accidents les plus meurtriers de l’histoire récente de l’exploitation artisanale congolaise.
Un drame « prévisible », disent certains, tant les signaux étaient visibles : pont précaire, tranchée ouverte, affluence massive, tirs intempestifs.
Les familles endeuillées, elles, n’attendent plus des discours. Elles réclament des réformes claires, un encadrement réel, et la fin de l’impunité dans un secteur où l’État brille trop souvent par son absence.
Parce qu’au-delà des chiffres et des communiqués, ce sont des vies brisées — celles de millions de Congolais qui tirent leur survie d’un secteur artisanal encore une trop dangereux pour ceux qui le font vivre.
La Rédaction




